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tes de M. KIRCHHOFF. Vers l'extrémité violette du spectre, les raies observées sont par contre moins nombreuses, vu la faible dispersion de cette partie. Cependant, pour donner même à cette portion du spectre une ressemblance aussi parfaite que possible avec la nature, je fus obligé d'ajouter ci et là quelques raies, quoique je n'eusse pas pris directement les mesures de leurs longueurs d'onde. Du reste, j'ai cherché à introduire aussi complétement que possible dans mes planches, toutes les raies provenant des substances dont on a prouvé, au moyen de l'analyse spectrale, l'existence réelle dans l'atmosphère du soleil. J'ajouterai enfin qu'on a dessiné quelquefois certaines raies comme étant doubles, conformément à leur aspect dans le spectre de réfraction, quoique dans celui de diffraction, il ne fût pas possible de les reconnaître sous cette forme. C'est ce qui a eu lieu par rapport aux raies doubles qu'on trouve à droite de la raie B.

J'ai indiqué aussi sur les planches l'origine de chaque raie et sa correspondance avec les raies des spectres métalliques, pour autant que ces faits ont été déterminés par les recherches que nous avons faites, M. THALÉN et moi, soit ensemble, soit chacun pour son compte. A ce dernier égard, je dois dire que toutes les recherches sur le titane et sur son existence dans l'atmosphère du soleil, sont dues exclusivement à M. THALÉN, qui s'y est livré en vue de son Mémoire, déjà cité, sur les longueurs d'onde des spectres métalliques.

Il va sans dire que j'ai profité aussi des planches spectrales publiées depuis plusieurs années par MM. KIRCHHOFF et HOFFMANN.

Enfin, pour faire connaître combien des raies ont été indiquées sur mes planches comme dérivant des substances connues, je les résume dans le tableau suivant:

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Le nombre total de ces raies s'élève environ à 800, nombre qu'on aurait aisément pu augmenter de beaucoup en employant des appareils plus énergiques pour mettre les corps à

*) Le nombre des raies du titane enregistrées sur mes planches, est très-inférieur à celui qu'a donné M. THALÉN, lequel nombre monte à 200. La raison en est: 1o que ma planche E-F était déjà gravée, avant qu'il eût terminé ses recherches sur ce métal, et: 2o que plusieurs des raies du spectre solaire qui correspondent actuellement aux raies titaniques, sont tellement faibles qu'on ne peut les distinguer que dans des cas exceptionnels de pureté et de dispersion du spectre solaire.

l'état d'incandescence *). Cependant, le nombre déjà trouvé suffira, comme on le voit, pour expliquer l'origine de presque toutes les raies fortes du spectre solaire et confirmera donc l'opinion, émise par moi dans un autre travail, que les substances constituant réellement la masse du soleil, sont sans doute les mêmes que celles de la terre. N'oublions pourtant pas de dire qu'il existe actuellement entre Fet G, à peu près au milieu, quelques raies fortes dont l'origine m'est encore inconnue; mais, les conclusions qu'on en voudrait tirer en faveur de substances solaires étrangères à notre globe, seraient certainement prématurées. Remarquons néanmoins, comme un fait curieux, que la plus forte de ces raies inconnues coïncide avec une raie forte du brome; mais les raies du chlore n'ayant aucune correspondance avec les raies Fraunhofériennes, il n'est pas probable que cette correspondance ait lieu par rapport au brome.

L'aluminium possède certainement des raies brillantes en plusieurs endroits du spectre, mais les raies situées entre les deux H, sont les seules qui semblent coïncider avec des lignes Fraunhofériennes. Pour expliquer ce phénomène singulier, il faut dire que les raies violettes se présentent comme les plus fortes dans le spectre de ce métal. De même que les raies jaunes du sodium, ces deux raies d'aluminium ont fait voir quelquefois le phénomène d'absorption consistant en ce qu'une raie noire se présente dans le milieu de chacune d'elles, ce qui prouve la forte intensité des dites raies. En observant les rayons extra-violets de ce métal, on décidera si les deux raies mentionnées ci-dessus coïncident ou non avec des raies Fraunhofériennes; car, si ma supposition est vraie, les raies extra-violettes doivent coïncider aussi avec des lignes obscures du spectre solaire.

A deux raies du zinc que j'ai indiquées sur mes planches comme coïncidant avec des raies Fraunhofériennes, il en faut ajouter une troisième, située à 4809,7; mais, à l'égard des deux raies, très-larges et très-fortes, d'une apparence nébuleuse, il n'y a pas de correspondance visible; ainsi, la présence du zinc dans le soleil me semble très-douteuse. Je dirai cependant qu'il existe trois raies du magnésium, du même aspect nébuleux, qui ne possèdent pas non plus de correspondance avec les raies de Fraunhofer, quoique la présence de ce corps dans le soleil ne permette pas le moindre doute.

De tous les corps, le fer a assurément produit le plus grand nombre de raies dans le spectre solaire. Ces raies, qui ne sont pas symmétriquement distribuées sur toute l'étendue du spectre, présentent deux maxima, dont l'un est situé près de E, et l'autre près de G. Quelques-unes paraissent être communes avec celles du calcium, mais une telle coïncidence de raies de différents métaux n'est souvent qu'apparente. Pour en donner un exemple, je citerai la raie forte du fer entre E et b, dont la longueur d'onde est 5226, et qui a été dessinée comme une raie simple sur les planches de M. KIRCHHOFF et sur les miennes. Cependant, comme l'a prouvé M. THALÉN en augmentant fortement la dispersion par l'emploi de six prismes en flint de 60 degrés, cette raie est actuellement triple, et les raies qui en font partie, appartiennent, l'une au fer et l'une des autres au titane.

Parmi les métalloïdes, l'hydrogène est le seul que l'analyse spectrale ait pu indiquer comme appartenant au soleil, tandis que les autres substances, telles que l'oxygène, l'azote et le carbone, qui existent en si grandes quantités sur la terre, ne peuvent jamais être découvertes dans le soleil par ce procédé. Pour indiquer nettement cette impuissance de l'ana

*) C'est seulement en opérant avec le fer, le manganèse et le calcium que fonctionna une pile voltaïque de 50 couples.

lyse spectrale par rapport à l'oxygène et à l'azote, j'ai dessiné au-dessous du spectre solaire les raies principales du spectre électrique de l'air, et on verra par là, qu'il n'y a pas de coïncidences entre les raies de ces deux spectres *).

Malgré le manque presque complet de coïncidences entre les raies du spectre solaire d'un côté et celles de l'oxygène ou de l'azote de l'autre, on n'est pourtant pas en droit de se prononcer définitivement sur l'absence totale de ces deux corps dans le soleil. En voici la raison: le spectre de l'air ne peut pas se produire même entre les électrodes de charbon d'une pile voltaïque, composée de 50 couples, et en général il ne se présente pas, si l'électricité se propage d'une manière pour ainsi dire électrolytique. Ce spectre exige nécessairement pour sa naissance une décharge disruptive, comme nous le prouvent évidemment les expériences avec les tubes de Geisler, contenant ces deux corps gazeux. En effet, tant que la décharge est accompagnée de l'électrolyse, les spectres obtenus à l'aide de l'air raréfié, appartiennent tous aux corps composés, et ainsi, il est trèsimpropre de les nommer, avec PLÜCKER, spectres du premier ordre; au contraire, en employant le condensateur, la décharge devient immédiatement disruptive et on a en même temps les spectres des corps élémentaires, c'est-à-dire le spectre ordinaire de l'air. Ce fait, très-important même pour la juste interprétation des spectres du soleil et des étoiles **), nous indique comme une chose très-probable que la température élevée du soleil ne suffit pas pour produire les raies brillantes de l'oxygène et de l'azote, et que par conséquent, même en supposant que ces corps existent actuellement dans le soleil, ils ne doivent pourtant pas occasionner de raies obscures dans le spectre solaire, de même que l'existence actuelle de ces corps dans l'atmosphère terrestre ne donne pas naissance à des raies telluriques.

Les observations sur les éclipses totales du soleil, et en particulier celles qui ont été faites dernièrement par MM. JANSSEN et RAYET, ont prouvé deux faits, savoir: 1° que la surface lumineuse de cet astre est immédiatement entourée de gaz pesants, qui, constituant ce qu'on appelle les protubérances, donnent naissance à un spectre de raies brillantes; 2o que cette même surface est en outre, à une hauteur considérable, environnée d'une couronne dont la lumière, polarisée et présentant un spectre continu, dérive du photosphère luimême du soleil. Cela admis, et en supposant que cette couronne contienne des éléments terrestres, il me semble qu'on ne peut pas admettre qu'ils soient autres que l'azote, l'oxygène et l'hydrogène.

Quant au carbone, on trouve qu'il exige de même une décharge disruptive pour amener la production de son spectre réel, qui possède une ressemblance assez notable avec celui de l'hydrogène. L'arc voltaïque, au contraire, qui se forme des électrodes de carbone à

*) Voici de plus une application pratique et très-utile qu'on pourra faire de ce spectre de l'air. De même que l'on a pu déterminer, par l'enregistrement dans le spectre normal, des longueurs d'onde des raies métalliques, on peut arriver à un résultat identique à l'aide du spectre électrique de l'air, quoique certainement avec une moindre exactitude dans ce dernier cas. A cet effet, il faut toutefois connaître les longueurs d'onde de ce dernier spectre, ce que les planches mentionnées donnent d'une manière suffi

samment exacte.

**) D'après la mémorable découverte de M. HUGGINS, l'une des trois lignes brillantes qui se trouvent dans le spectre des nébuleuses coïncide avec la raie forte et verdâtre de l'azote. Mais cette raie est double, et la distance des deux composants est de trois unités en dix-millionièmes de millimètre; il paraît donc qu'on devrait pouvoir constater cette même duplicité dans la raie correspondante du spectre des nébuleuses.

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l'aide d'une pile de 50 couples, ne donne pas le spectre propre *) du carbone, mais seulement ceux des carbures d'hydrogène et du cyanogène. L'apparition de ces deux derniers spectres coïncide du reste avec les phénomènes ordinaires de l'électrolysation, où les éléments de l'électrolyte se combinent avec les électrodes. On pourra donc conclure que la température produite par la pile voltaïque mentionnée, ne suffira pas pour mettre le carbone à l'état gaseux; que, par conséquent, en appliquant ces résultats au cas du soleil, sa température doit être regardée, d'un côté, comme trop élevée pour admettre l'existence de combinaisons telles que le cyanogène et l'hydrogène carburé, mais que, de l'autre, elle est trop basse pour pouvoir vaporiser le carbone. Il est donc très-probable que le carbone existe à l'état solide dans le photosphère du soleil, et de plus, que, conformément à la théorie remarquable de M. FAYE, c'est principalement de l'incandescence de cette substance, que provient le spectre continu du soleil.

D'après les observations faites par MM. SECCHI et HUGGINS, les raies d'absorption dans les spectres stellaires sont de deux espèces: chez l'une, le spectre est rayé de lignes très-fines, comme le spectre solaire; chez l'autre, les raies constituent des groupes entiers à espaces égaux ou des bandes nuancées. Ces derniers groupes appartiennent vraisemblablement aux corps composés, et je mentionnerai, en particulier, que ceux trouvés dans le spectre de a Orionis, ressemblent fort aux bandes lumineuses que donne le spectre de l'oxyde de manganèse. Supposé que ma théorie soit juste, l'apparition de ces bandes doit donc indiquer que la température de l'étoile est devenue assez basse pour que de telles combinaisons chimiques puissent se former et se conserver.

Entre ces deux limites de température chez les étoiles, limites que l'on peut caractériser par la présence de l'une ou de l'autre espèce des raies d'absorption, on peut s'imaginer aussi un état intermédiaire, dans lequel les gaz composés peuvent se former ou se dissocier, suivant les variations de température auxquelles ils sont assujettis par l'action chimique même. Dans cette classe doivent probablement être comprises les étoiles dont l'intensité de lumière varie plus ou moins rapidement et avec une périodicité plus ou moins constante.

Mais je crois devoir m'arrêter, n'ayant pas l'intention d'entrer ici dans une discussion détaillée sur cette matière intéressante. Ce que je viens de dire, suffira cependant à faire voir la nécessité d'étudier d'une manière approfondie, non-seulement les spectres des corps élémentaires, mais aussi ceux des combinaisons chimiques les plus importantes, comme l'a déjà fait avec beaucoup de succès M. MITSCHERLICH.

Dans un Mémoire sur les spectres "doubles" des corps élémentaires que nous publierons prochainement, M. THALÉN et moi, dans les Actes de la Société des Sciences d'Upsal, nous traiterons d'une manière suffisamment complète les questions importantes qu'on peut se proposer sur cet intéressant sujet. Pour le présent, je me borne à dire que les résultats auxquels nous sommes arrivés, ne confirment aucunement l'opinion émise par PLÜCKER, qu'un corps élémentaire pourrait donner, suivant sa température plus ou moins élevée, des spectres tout-à-fait différents. C'est le contraire qui est exact. En effet, en augmentant successivement la température, on trouve que les raies varient en intensité d'une manière très-compli

*) Le spectre du carbone, dont il est ici question, fut observé, il y a cinq ans, par M. THALEN et moi; l'une des raies qui appartiennent à ce spectre, celle qui se trouve à côté de C, a aussi été observée par M. HUGGINS. Le spectre observé par M. SWAN est probablement dû à l'acetylène.

quée, et que, par suite, de nouvelles raies peuvent même se présenter, si la température s'élève suffisamment. Mais, indépendamment de toutes ces mutations, le spectre d'un certain corps conservera toujours son caractère individuel.

β) Raies telluriques.

J'ai dit auparavant qu'à quelques exceptions près, on retrouve toutes les raies Fraunhofériennes les plus fortes dans les spectres des métaux. Cela ne s'applique toutefois pas à l'extrémité rouge du spectre, où l'on observe des groupes nombreux de raies dont on ne peut pas expliquer l'origine par l'absorption dans l'atmosphère du soleil.

Les variations existantes dans leur apparition, ont prouvé que ces raies sont dues à l'atmosphère terrestre, et on les nomme pour cette cause raies telluriques. MM. BREWSTER et GLADSTONE *) ont déjà publié une description détaillée de ces raies; mais le dessin qui l'accompagne est toutefois assez peu satisfaisant. Dans ces derniers temps, c'est surtout M. JANSSEN qui les a étudiées avec le plus de soin, et il a même réussi à produire, par des expériences directes sur l'absorption de la vapeur d'eau, des raies noires, situées près de B, C et D. Cependant, je n'ai pas encore vu de dessin de ces raies, et j'ignore même s'il en a publié. M'étant aussi livré à l'étude de ce sujet, j'ai indiqué par des raies nuancées, au bord supérieur de mes planches, celles que j'ai trouvées appartenir à l'atmosphère de notre globe. Jusqu'ici, cependant, c'est à l'extrémité rouge du spectre que j'ai consacré mes études de détail.

Dans mon Mémoire de 1853, j'énonçais déjà, le premier en date à ce que je crois, la loi fondamentale qu'un gaz à l'état d'incandescence émet des rayons lumineux de la même réfrangibilité que ceux qu'il peut absorber. Je cherchais aussi, à ce temps-là, à trouver des correspondances entre les raies telluriques et les raies lumineuses que présente le spectre électrique de l'air. Mais, comme je l'ai constaté depuis, aucune correspondance de ce genre n'existe, et l'on a vu ci-dessus la cause probable de cette circonstance remarquable.

Puisque, du moins d'après la loi d'absorption énoncée ci-dessus, les raies telluriques ne sont dues ni à l'azote, ni à l'oxygène, il faut les attribuer vraisemblablement à l'absorption des autres gaz qui constituent réellement l'atmosphère terrestre, et l'on peut donc, en premier lieu, nommer la vapeur d'eau. Je pense aussi que la plupart des raies telluriques indiquées sur mes trois premières planches, dérivent de cette substance; mais en outre il existe trois groupes, représentés par A, B et a, dont l'origine doit être attribuée à d'autres substances.

J'ai exposé, dans les Comptes-rendus de l'Académie de Sciences de Paris **) les motifs qui m'ont déterminé à faire cette conclusion, et je me permets de les reproduire ici:

"Pendant les grande froids du mois de Janvier 1864, j'ai observé, à Upsal, le spectre solaire à plusieurs reprises, une fois par une température de 27 degrés centigrades au-dessous de zéro. Les raies telluriques situées près de D, de Cet de a, ainsi que celles qui se montrent de a à B, avaient presque entièrement disparu, tandis que les groupes A et B, et un troisième situé à peu près au milieu entre Det C dans nos planches

*) Philosophical Transactions, T. 150, London, 1860.
**) Τ. 63, 1866 р. 647.

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